Lundi 9 décembre 2013,
Ma journée a mal commencé quand j’ai voulu poster 5 lettres et demander une facture à La Poste de Savenay !
La banque « oui », mais pas le courrier !
Sur les deux guichets principaux, un seul était occupé par un employé ; au dessus de lui une pancarte où est inscrit « toutes opérations » et aucune file d’attente. Dans le coin de droite deux personnes attendent et une employée explique dans la file d’attente qu’il faut aller aux machines. Arrivé mon tour, j’explique ma demande et j’ai la ritournelle en retour « allez aux machines, elle donne les reçus ». J’explique que je préfère avoir à faire à un humain. Elle me rétorque que ce n’est pas possible, qu’aucun guichet est ouvert et que l’employé présent n’est là que pour les opérations bancaires !
Sur ce j’ai fait demi-tour en précisant que je les posterais à Nantes ; qu’il y aurait peut-être des humains !
Bien mal pensé de ma part !
Arrivé à La Poste de Nantes, vers 11h40, je suis dans la file d’attente et quand vient mon tour, après explication de ma requête, devinez ce que l’on m’a dit : « allez aux machines, elle donne les reçus » ! J’explique à nouveau que « je préfère le contact humain et que je sais que ce n’est pas évident comme métier d’être derrière un guichet, y ayant moi même exercé le métier à la SNCF ». Dans son plus beau verbe l’employée m’a alors répondu « vous aussi vous savez ce que c’est d’avoir un abruti devant soi ! ». D’un ton calme, je lui répondis « qu’elle se tirait une balle dans le pied ! », ce à quoi elle me rétorqua, qu’elle n’avait « pas besoin de leçon de syndicalisme surtout de la part des cheminots ; que ce n’est pas avec les syndicats à la SNCF que l’on allait avancer ». Je me suis tu (avec beaucoup de mal, je dois l’avouer...), lui laissant ses propos car cela n’aurait pu qu’envenimer la situation ; de plus je sais que ce n’est pas de sa faute !
L’usager travailleur
Rien qu’à la lecture du mot « usager », je pense que vous avez des démangeaisons sauf quand il est employé pour aplanir une situation pouvant devenir critique comme « comité d’usagers », « associations d’usagers » ; là vous êtes conciliant !
Par contre pour utiliser la dénomination de « service public » vous n’avez pas peur de galvauder la définition en y accolant devant, le mot « mission » !
Madame, Monsieur, je pense que vous comprendrez vraiment ce que sont les suppressions d’emplois quand on vous remerciera à votre tour, ou pire quand vous verrez vos enfants « crever » de votre économie de marché. Votre management, comme vous dîtes, qui veut que le salarié explique au consommateur que c’est normal qu’il paye et travaille (voir être sanctionné si il a mal travaillé !) pour obtenir son bien dit de consommation ; voire même le culpabiliser s’il n’arrive pas à se servir de la machine. Vous déshumanisez la partie sociale que peux apporter le salarié d’un service public !
Mais cette « docilisation » des consciences ne peut intervenir sans un accord préalable des salariés, accord au moins implicite, parfois contraint et forcé, mais le plus souvent volontaire. C’est là votre côté pernicieux qui consiste « à leur mettre la piqûre managériale » !
Pour finir, permettez-moi, une fois de plus, de continuer à manifester, mon désir de voir des humains, de plus est, pouvant s’épanouir dans leur travail, plutôt que de les sentir près de la crise d’anxiété à la vue de la longueur des files d’attentes et des sièges vides de guichets abandonnés.
Facteur de richesse
Ironie de l’histoire, je me rendais ensuite à une réunion pour une mise en page de journal, dont un article sur un colloque de facteurs qui s’est déroulé cette année. Je me permets de vous en livrer un extrait, une réflexion, en avant-première :
« Il s’agissait de faire le point sur l’évolution d’une profession en cours de mutation. Qu’il soit facteur de ville ou visiteur des foyers les plus isolés en milieu rural, messager des bonnes ou des mauvaises nouvelles, il personnifie le Service public et son passage journalier est attendu par tous.
Aujourd’hui cependant, le courrier classique est concurrencé par d’autres moyens plus modernes de communication. La Poste parle d’une nécessaire adaptation. La profession s’inquiète donc, à juste titre, d’un risque d’exploitation à des fins mercantiles de cet attachement des usagers à leur facteur. »
Si le facteur est placé second dans la cote de popularité des français, c’est bien parce que le contact humain est source de vie.
Sachez que je fais encore partie des humains qui se considèrent comme faisant partie du public de certaines entreprises, mais que je ne vois plus votre service mais bien votre mission de ne résumer votre activité qu’au mot « euro » en balayant tout au passage, même votre cœur de métier !
Je refuse d’être votre consommateur travailleur créateur de valeurs ; je ne serais pas spectateur de l’avenir !
Je pense que cela doit vous rassurer que cette peste n’est pas propagée uniquement par votre entreprise. Ce sont toutes les « ex-entreprises de service public » qui s’enivrent de cette économie. La déshumanisation est votre fer de lance !
Espérant que ce n’est pas un scanner qui fera une reconnaissance de caractères pour dicter en reconnaissance vocale à un autre ordinateur une réponse pré-formatée, recevez, Madame, Monsieur mes plus humaines salutations.
Patrice MOREL
PS : Si vous avez des problèmes de retranscription et communication, vous trouverez le texte intégral sous forme d’article sur mon site personnel et réseaux sociaux.
Quelques réactions d’internautes... au fur et à mesure !
Le 18/12/2013,
Bonsoir Patrice,
En lisant votre réclamation qui a circulé sur nos boîtes mail, je comprends votre désarroi. Employé de La Poste et confronté aux multiples difficultés inhérentes à la nouvelle stratégie de l’entreprise, je ne peux qu’adhérer à votre vision réaliste de la situation en bureau. Ainsi, nos collègues crédules espèrent sauver leur peau en appliquant à la lettre les directives sans fondement de notre hiérarchie. Certains de ces mêmes collègues n’ont pas encore compris que nos cadres sont commissionnés en fonction de la non-utilisation de personnel. En d’autres termes, les personnes non remplacées pendant leurs congés, en maladie ou encore en formation font grossir la part(financière) variable annuelle de notre hiérarchie lorsque celle-ci ne fait pas appel à des moyens de remplacement.
Et croire que de diriger les clients systématiquement vers les automates va permettre de sauver des emplois est une absurdité qui n’a d’égale que la cupidité de nos dirigeants. Ces mêmes dirigeants qui critiquent les syndicats sont trop heureux de dépenser leurs revenus pendant des vacances chèrement acquises par des personnes qu’ils ne connaissaient même pas ! Quel manque de respect. Je pourrai épiloguer longuement sur les problématiques et les dysfonctionnement flagrants de notre entreprise mais j’aimerais surtout que la lucidité et la responsabilité de chacun, à votre image, soit en éveil afin que l’humanité, si elle existe encore, trouve sa place dans un contexte professionnel sensé garantir l’épanouissement. Merci, avec mes salutations.
PS : Si vous vous présentez à moi dans un bureau où je suis en activité, je vous promets que je vous servirai personnellement quelles qu’en soient les conséquences.